Dorothée : « Où sont passés les sauts d’eau sur la tête ? »

 


En un claquement de doigt, fin des années 90, Dorothée est passée du statut de baby-sitter la plus connue et idolâtrée de France à celui de parfaite anonyme. Elle ne se confie jamais aux médias d’habitude mais la démarche sincère et l’impartialité garantie de PARIS VACHE aura su la convaincre. Avec une franchise déconcertante que l’on ne soupçonnait pas, elle évoque tout dans cet entretien exclusif : la nostalgie, la vie en cours, les regrets, les espoirs, les projets…

Chers grands enfants, bonne lecture !


En 1997, après dix années d’audiences exceptionnelles, vous avez décidé d’arrêter le Club Dorothée sur TF1. Pourquoi ?

Il faut bien imaginer que nous (Ariane, Corbier, Jacky, Patrick) ne faisions que présenter le show. Au bout de dix ans, il était devenu vraiment trop frustrant de seulement lancer les programmes sans jamais les regarder. Nous avons donc arrêté pour voir enfin tous les épisodes de chaque dessin animé que nous avions ratés si l’on peut dire. On a rattrapé le temps perdu ! J’en ai reparlé l’autre fois avec Jacky. Lui, il a mis cinq ans à tout regarder dans l’ordre proposé par l’émission. Personnellement, j’ai mis deux années de plus et ai opté pour les séries entières, d’une traite. Candy, ce fut un peu longuet et Ken le survivant un peu indigeste, je veux bien l’avouer. Bref, quand tout le monde a eu fini environ huit ans plus tard, on s’est recontacté pour refaire une sorte de Club Dorothée au concept assez similaire et qui devait s’appeler Dorothée Club. Malheureusement, à notre grande surprise, l’étude de marché a révélé que les nouveaux enfants ne seraient pas intéressés. En revanche, leurs parents, si ! Toujours ! Problème : le MEDEF a aussitôt fait part de ses inquiétudes quant à l’assiduité des ouvriers ou aux retards qu’occasionnerait le retour de l’émission. On a cédé et renoncé sous la pression. Dommage.


Vous étiez survoltés sur le plateau et dégagiez une énergie folle. Y avait-t il de la drogue dans les loges ?

Dans les loges, je ne sais pas, mais partout ailleurs, oui. On avait la grosse trentaine, on devait captiver l’attention de millions de gosses donc la cocaïne s’est naturellement imposée à nous. J’imagine que les instits en font autant sinon c’est impossible. Par contre, on en n’a jamais donné aux gamins du public. On s’est toujours fixé cette limite. On avait des principes, une éthique.

Quel était votre Musclé préféré ?

Framboisier ! Parce que j’adore le coulis de framboise ! (elle marque une pause) Ah non je n’ai pas dit ça pour faire une allusion ou je ne sais quoi ! Vous n’écrirez pas ça n’est-ce pas ? D’accord, je vous fais confiance. Non mais j’adore vraiment ça en dessert ! Surtout, Framboisier était de loin le plus talentueux des Musclés. Il avait et a toujours cette créativité de chaque instant, cette subtilité, cette éclair de génie dans son œil pétillant. La chanson « Merguez-partie », c’est lui et lui seul. J’étais là quand il l’a composée. Impressionnant. En deux minutes, c’était plié, musique et paroles. Je l’écoute encore régulièrement dans les moments un peu difficiles de la vie et ne manque jamais de le remercier aussitôt après.

Vous avez vous-même chanté et vendu un nombre considérable de disques. Avec le recul, quelle était la recette de ce succès ?

Je pense sincèrement que cela vient tout simplement de ma voix, de ce grain particulier et chaud. J’ai ce don depuis toute petite. Je n’ai jamais eu besoin de travailler et c’est très appréciable. La chanson « Hou ! La menteuse », je l’ai enregistrée en une prise par exemple. Quand je raconte ça à ma grande amie Natalie Dessay, elle ne me croit jamais.

Comment faites-vous pour vivre aujourd’hui ?

J’ai gagné beaucoup d’argent en dix ans et ai acheté une maison confortable dans laquelle je vis toujours, loin de Paris, dans un endroit calme où les gens me connaissent sous mon vrai nom de Frédérique Hoschedé ou Frédoche pour les quelques intimes. On me respecte et on me laisse tranquille et ça me va très bien ! Je n’ai pas signé un autographe à un imbécile d’adulescent depuis cinq ans au moins. Je me rappelle d’ailleurs que j’avais signé Jeannine. Non mais c’est bon quoi ! Par ailleurs, je touche toujours quelques droits sur mes disques vendus chez Noz et je me suis mis à fabriquer des chaussettes rouges et jaunes à petit pois, en laine, au tricot, que je mets en dépôt dans des boutiques de créateurs de la Sarthe. Ça fait huit ans et ça décolle doucement. 

Pourquoi ce pseudo de Dorothée alors à l’époque ?

Parce que Frédérique, c’était pas assez fort, il fallait un prénom exclusivement féminin. La nièce de ma voisine avait un chat qui s’appelait Robert et Robert était aussi le prénom de mon arrière grand-père qui avait dit sur son lit de mort qu’il regrettait de ne pas avoir eu de fille et qu’il l’aurait appelée Chantal. Comme j’aime pas trop le prénom Chantal, j’ai choisi Dorothée.

 

Dorothée chantant L'Internationale au Congrès du Parti Communiste en 1996
Dans Pas de pitié pour les croissants, diffusé le dimanche matin, vous dévoiliez une autre corde de votre arc : le jeu d’actrice. Pourquoi ne pas avoir continué dans cette voie plus tard ?

Ce programme était de loin à mes yeux le plus abouti de tous ceux proposés par AB Production. C’était un peu la vitrine et c’est vrai, en effet, que je sortais un peu de mon rôle de simple présentatrice et que ça me faisait un bien fou. Pas besoin de cours Florent quand c’est inné. Tout le monde était parfait d’ailleurs, on a beaucoup ri lors de ces tournages mais surtout beaucoup appris du métier d’acteur. Si l’on n’a pas remis ça plus tard c’est tout simplement parce que l’on a dû souffrir de cette étiquette soit-disant « pas sérieuse » et que la grande famille du cinéma (elle lève les yeux au ciel), les Audiard, les Gondry ou les Ozon nous ont snobés. Tant pis pour eux, nous au moins on sait ce que qu’on vaut, le public aussi, et Pas de pitié pour les croissants le prouvera pour l’éternité.

Avez-vous une anecdote de tournage à nous partager ?

(Elle pouffe) Oh oui, très certainement ! Il y en a même trop pour s’arrêter sur une seule mais je vais essayer… (Elle cherche). Allez va pour celle-là allez ! On tournait généralement le lundi matin, ce qui n’est vraiment pas facile. Un jour, Corbier est arrivé encore pété de son week-end passé à Ibiza et il n’y arrivait pas. Le texte, le jeu, rien. Il s’endormait en pleine prise. Une épave, je crois qu’on peut le dire ! On était en train de perdre notre temps et nos nerfs quand Ariane a eu l’idée incroyable de se foutre à poil et d’exiger qu’on la filme en gros plan sur son visage. Eh bah ça a marché, Corbier a ensuite eu les yeux grands ouverts tout du long et on a pu mettre les images en boîte.

Regardez-vous les émissions jeunesse et les dessins animés d’aujourd’hui ?

Oui, d’un œil, par curiosité mais je ne tiens jamais plus de deux minutes. Franchement, tout est déshumanisé, il n’y plus de place pour l’échange et la camaraderie. Où sont donc passés les sauts d’eau sur la tête ? Les batailles de nourriture ? Les courses en sac ? J’irais même plus loin : où est passée est la vie ??? Quant aux dessins animés, ils sont absolument fades et sans intérêt. Où sont passées les mains aux fesses d’un Nicky Larson ? Où sont passées les petites princesses habillées en rose qui faisaient rêver les petites filles ? Où sont les grosses voitures, les héros musclés pour les petits garçons ? Et le sang ? On ne voit plus de sang et de tête arrachée à mains nues avant l’âge de huit ans maintenant ! Non vraiment, c’est devenu n’importe quoi.

Après toutes ces années, aimez-vous toujours autant les enfants ?

Mais je n’ai jamais aimé les enfants ! C’était un travail et il se trouve que les enfants étaient la cible. C’est insupportable un gamin et je n’en n’ai même pas eu moi-même pour cette raison. Par contre, je suis fière d’avoir aidé les parents en abrutissant leurs progénitures trois heures par jour car pendant ce temps au moins, ils avaient la paix.

Des projets à venir ?

Peut-être une émission pour seniors avec des dessins animés du genre de Trotro pensés à la base pour les tout petits mais qui fonctionneraient à merveille pour la rééducation des yeux, pour les séquelles d’AVC ou pour Alzheimer. Je réfléchis encore.

                                                                                                        

                                                                                                                                              Faux propos recueillis par Zitoune


 


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